ERENA

Ce n’est pas au médecin de répondre à cette question, c’est à la société. C’est le rôle du politique qu’il faut renvoyer à ses propres responsabilités. QR : Nous évoquons ici le problème des greffes mais il y a aussi le problème des traitements médicaux simples, par exemple contre la tuberculose ou contre l’hépatite : nous avons de la peine à leur faire suivre ces traitements au long court, soit qu’il s’agisse d’un problème de communication soit qu’il s’agisse des modalités de prise en charge. Ils sont itinérants et vont de familles hébergeantes en familles hébergeantes, ce qui n’aide pas à la transmission des informations. La problématique de ce soir est beaucoup plus large aujourd’hui. Elle est axée sur le greffon parce qu’il y a un enjeu économique. Je fais partie de l’association « Mine de rien » qui prend en charge les mineurs qui arrivent sur le territoire et la grosse difficulté c’est la stabilité dans le suivi, d’hébergement, même dans le cadre de l’Aide sociale à l’enfance (ASE). C’est réellement une problématique politique et économique. Ils ont la Couverture Maladie Universelle (CMU), l’Aide médicale d’Etat (AME), ils peuvent passer plusieurs examens radiographiques mais demeure leur précarité qui provoque des échecs thérapeutiques. J’ai le cas d’un enfant qui avait une tuberculose non traitée qui s’est compliquée en aspergillose qui s’est terminée par une ablation d’une partie du poumon. Ce sont des complications qui arrivent par défaut d’observance thérapeutique. AT : Nous sommes d’accord bien sûr mais il y a une complexité éthique supplémentaire avec la transplantation, c’est qu’il y a un greffon, ce qui veut dire qu’il y a au départ un prélèvement. Et qu’en tant que médecin, nous devons faire accepter dans nos milieux médicaux, dans nos équipes et dans la société le fait que nous exerçons notre métier dans un pays comme le nôtre avec le devoir de greffer les patients qui nous sont confiés, quelle que soit leur origine. Car, nous, les premiers, sommes confrontés à des réflexions comme : « Les prélèvements des français sont pour les français ». Et il reste toujours ce difficile problème relatif à l’équité d’accès à la greffe. QR : J’ai bien compris mais ce que je veux dire c’est que cette problématique de la langue française, de la communication, de la stabilité sociale, de l’hébergement, elle est commune. Si on y répond d’une manière commune vous en bénéficierez sur le plan des migrants. QR : Est-ce que l’Agence de Biomédecine donne des pistes de réflexion ? AT : C’est le grand silence. Les autorités de santé sont embarrassées. Chaque centre a sa propre politique. Il n’y a pas de bonnes pratiques, de recommandations ; mais, au fond, n’est-ce pas mieux que chacun agisse en conscience dans son équipe ? L’inconvénient c’est que nous sommes laissés seuls et que nous aimerions bien parfois que le politique s’en mêle pour nous aider mais c’est vrai aussi que nous pouvons, heureusement, exercer notre métier. Il y a ambivalence, nous aimerions que le politique nous soutienne et nous donne un cadre de la part de l’autorité de santé et en même temps nous sommes satisfaits car on nous laisse exercer notre métier en notre âme et conscience. QR : Y-a-t-il des positions qui pourraient être différentes d’un centre à un autre ? 53

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