Enjeux éthiques soulevés par la vaccination contre la Covid-19

2 européenne, leur disponibilité selon les pays est rapidement apparue hétérogène 4 , voire insuffisante, traduisant un problème général de production des vaccins, mais aussi l’effet des politiques nationales et internationales, et la prévalence des intérêts économiques et financiers aux dépens de l’intérêt général. L’accès des populations à la vaccination, à l’échelle mondiale, offre une mesure efficace et l’espoir majeur, de plus en plus partagé par la population, de contrôle de la pandémie 5 . Cependant, cet espoir ne masque pas le contexte inédit d’incertitude qui caractérise cette pandémie et se manifeste à travers l’évolution du virus avec l’arrivée de variants, la disponibilité des vaccins, la survenue d’effets indésirables dont le lien avec le vaccin questionne encore 6 , l’incertitude économique et sociale, etc. Ainsi, début 2021, l’apparition de variants 7 du SARS-CoV-2, qui se propagent rapidement, plus infectieux et possiblement plus virulents, soulignent chaque jour l’évolutivité des caractéristiques de la pandémie. Des doutes, des inquiétudes justifiées, des réactions de refus à l’égard de la vaccination, subsistent dans ce contexte. Face à ces incertitudes, que peuvent accentuer les lacunes d’une communication jugée insuffisante, maladroite, non-transparente, institutions et citoyens sont souvent contredits ou déstabilisés par l’évolution de la crise et obligés de s’adapter sans cesse. La mise en tension d’intérêts individuels et de ceux de la société s’exprime particulièrement dans les enjeux de santé publique, et confronte chacun à une responsabilité individuelle autant que collective. La vaccination, qui est aussi un enjeu de santé publique, exacerbe ce conflit de valeurs majeur en médecine, particulièrement en situation de pandémie et dans ce contexte d’incertitude. Deux questions donnant lieu à débat aujourd’hui l’illustrent bien : celle de l’obligation vaccinale et celle concernant la mise en place d’un « pass sanitaire » qui, subordonnant l’accès à certains lieux collectifs à l’absence de risque de transmission, est source d’une restriction des libertés. L’enjeu éthique est celui du juste équilibre entre le principe d’autonomie qui repose sur la liberté de consentir de chacun et la responsabilité collective, puisque la vaccination confère une protection non seulement pour soi-même, mais aussi pour autrui. Cette articulation dépend également de l’accessibilité du plus grand nombre aux vaccins et des incertitudes qui subsistent quant à leur efficacité contre les variants. Ne souligne-t-elle pas aussi l’ambivalence d’une situation où l’on requiert la confiance alors que le contexte suscite la défiance ? La réflexion éthique proposée par le CCNE et la CNERER s’appuie sur des repères constitués par les valeurs qui fondent notre société : la garantie et la protection de la dignité humaine, la liberté et l’autonomie, l’égalité et la solidarité, la justice et l’équité, la responsabilité individuelle et à l’échelle du collectif. 4 À la date du 21 mars 2021, le nombre de personnes ayant reçu une première dose de vaccin en France est de 6 199 118, soit 9,2 % de la population totale. Ce pourcentage est de 23,3 % aux Etats-Unis, de 45,3 % au Royaume-Uni, de 55,4 % en Israël. On mentionnera aussi le nombre de personnes à risque en France, du fait de leur âge ou de leurs comorbidités, estimé par le Conseil scientifique Covid-19 avec le Comité vaccin et CARE : 23 millions (9 juillet 2020). 5 A. Fontanet et al. (2021) SARS-Cov-2 variants and ending the Covid-19 pandemic. The Lancet, 397, 952- 954. 6 Voir : pharmacovigilance risk assessment committee investigation: https://www.ema.europa.eu/en/news/covid-19-vaccine-astrazeneca-prac-investigating-cases- thromboembolic-events-vaccines-benefits. 7 Deux variants principaux circulent en France actuellement : B.1.1.7 ou 20I/501Y.V1 (britannique), B.1.351 ou 20H/501.V2 (Afrique du Sud) ; citons aussi un variant Brésilien/japonais (P.1, ou 20J/501Y.V3).

RkJQdWJsaXNoZXIy MTA0MzE1MQ==