ERENA

Nous constatons que la compliance au traitement, le fait de garder le greffon, le public ne s’y intéresse pas tellement, ce qui leur pose problème c’est : « est – ce que c’est quelqu’un de résident aux Etats Unis ou d’ailleurs ? C’est très important pour le public aux Etats Unis et ça conditionne le fait qu’ils vont dire « celui-là ne mérite pas la greffe parce qu’il n’est pas résident » malgré sa très mauvaise santé. Le poids de la résidence est plus important que la gravité de la maladie qui va conduire à la mort. AT : En parlant de complexité, nous avons parlé de l’Europe. Evoquons le « couple franco-allemand ». Les allemands ont une démarche plus stricte concernant l’insuffisance rénale : lorsqu’un migrant arrive en Allemagne pour une insuffisante chronique terminale rénale, il est pris en charge en dialyse dans le contexte d’urgence sauf que ça ne dure que 15 jours et au bout de ces 15 jours ces patients sont reconduits à la frontière. Nos collègues de Strasbourg nous racontent régulièrement que leur centre de dialyse est saturé de patients ressortissants des pays de l’Est, déposés à la frontière française par nos collègues allemands et pourtant ce sont nos collègues les plus proches. On peut dire que même en Europe nous ne sommes pas capables de définir une politique sanitaire commune. QR : Le very bad trip existe aussi à la française, on peut très bien greffer en France une personne qui à un moment donné va dériver et le greffon sera abîmé. Est-ce que le cas de conscience est identique ou différent parce que c’était un migrant ? AT : Dans les deux cas c’est un échec, dans les deux cas c’est un greffon prélevé sur un donneur et qui échoue, en terme d’humanisme c’est la même chose. Par rapport au migrant on se pose plus de question au départ et l’échec est plus saillant mais dans l’équipe nous sommes tous d’accord pour dire que c’est la même chose. CS : Pour nous c’est la même chose. Chez cette patiente ce n’est pas le fait qu’elle soit géorgienne et qu’elle ne parle pas français, c’est vraiment parce qu’elle est isolée, elle était très précaire, on n’arrive pas à lui trouver un toit c’était vraiment ça le problème. Qu’elle soit des Deux Sèvres ou de Géorgie, la problématique est identique. AT : Pour en revenir au questionnement sur l’échec, on peut dire que l’échec est plus difficile à vivre chez un patient migrant qui a demandé beaucoup plus d’investissement et l’activation autour de lui de toute une chaine de mobilisation sur le plan social, sur le plan de l’interprétariat. Intervention J’ajoute une réflexion concernant la réponse du CCNE et finalement ce qui est proposé comme politique d’intégration des migrants. Je suis convaincu de la nécessité d’assurer un environnement familial ou social pour aller vers la réussite de la greffe et l’adhésion au traitement. Et finalement quand un migrant arrive sur le territoire, on lui ouvre certes des droits mais on s’arrête beaucoup à cela. Or concernant l’apprentissage de la langue, on constate bien que nous sommes insuffisants pour faciliter les scénarios positifs c’est à dire que finalement on ne propose pas suffisamment d’actions tournées vers l’intégration avec des cours de langue. Met-on aussi en œuvre tout ce qui est possible pour permettre la sauvegarde de liens familiaux ? Il y a ceux qui arrivent avec leur propre force, leur propre détermination pour s’intégrer coûte que coûte et il y a ceux qui ont cette fragilité supplémentaire par rapport à la population française. Finalement la réponse du CCNE, nous renvoie à la question : « Que fait-on en termes de politique d’intégration pour avoir une prise en charge optimale » ? 52

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